David Toop & Irwin Barbé -
Reflections from Sound (in an Irregular Garden)

Figure de la scène alternative lyonnaise, Irwin Barbé explore dans ses projets les correspondances entre les sons électroniques analogiques et tous les sons d’origine non-humaine : le bruissement ultrasonique des insectes, les mouvements de l’eau entre les racines, un battement d’ailes de papillon, le passage d’un oiseau solitaire, des cumulus roses qui s’amassent à l’horizon ou le grésillement d’un fil électrique.
Dans Forêt de synthèse, en utilisant seulement un synthétiseur analogique Buchla, il recrée un environnement sonore marquant de son enfance : celui d’une mangrove de l’île Saint Martin aux Antilles. À travers ce paysage sonore synthétique il propose une expérience biomimétique singulière où les catégories s'inversent et se recouvrent : organique et électronique, naturel et artificiel, humain et non-humain, musique et non-musique.
David Toop est un aventurier de l'écoute, à la fois musicien et écrivain, né en Angleterre en 1949. En tant qu'auteur, il signe notamment l’indispensable Ocean of Sound (1995), sorte de cartographie intime de l’espace sonore post-moderne (ou post Debussy) qui installe définitivement la constellation des esthétiques ambient au firmament musical. Comme musicien, il est l’auteur d’une importante oeuvre discographique, commencée en 1975 dans le mythique label Obscure de Brian Eno jusqu'à son dernier disque paru en 2021 : Gardens of Shadow and Light, superbe collaboration avec le regretté Ryuichi Sakamoto. Collectionneur insatiable de disques et d’instruments du monde entier, infatigable arpenteur des musiques traditionnelles, mémorialiste des esthétiques minoritaires, il pratique la musique expérimentale comme un exercice proustien de réminiscence en défense de l'âme, sauvant de l’oubli tout ce qui peut l’être.
Pour Superspectives, il fera mémoire de l’ami disparu Ryuichi Sakamoto à travers une pièce intitulée Reflections from sound (in an irregular garden). C’est la réminiscence, dans un jardin français, des liens organiques entre jardins zen et anglais à partir du XVIIe siècle quand un botaniste britannique rapporte avec le mot sharawadji, déformé du japonais ‘sorowaji’ l’art chinois et japonais de planter asymétriqument et à moitié par hasard. C’est aussi une mémoire de Proust et de ce passage sur la sonate de Vinteuil où Swann assure que le son, comme l’eau ou le miroir, émet des reflets. C’est enfin un souvenir de Debussy et des cloches entendues à travers les feuilles.